A salutation to Lambros (2010) en/fr

dromoi-tis-orgis-1-ac633

The struggle of those who fight against all forms of power, who are anxious that each moment should not be wasted and who stubbornly maintain the belief that we are capable of creating a free and non-authoritarian world, is as distant from any kind of mythology or fiction as the earth is from the moon.

 

This struggle has had, has and will have countless casualties; dead, captured, and people who desist because they lose hope or compromise themselves because the powers that be have found the low or high price to buy them off.

Those seeking saints, martyrs or messiahs, or heroes and mythical beasts, are ultimately no different from those who do not miss the opportunity to point the finger at the scoundrels, the black sheep, the criminally suspect and those who politically have already lost. Both the superior beings depicted by one side and the extremist creatures from the other are equally expendable. In either case the purpose is to keep everyone sedated and docile, despite what the proponents of either side might claim.

Some ecstatically speak of those ’sacrificed’, while the others piously try to measure the political loss. It is of little importance whether this convergence is achieved due to fanaticism or delusion, ignorance or expediency, for reasons of political visibility and survival or practising dogmatism. Those who are supposed to object shout to convince everyone that they have unfinished business with them, but this fraud is difficult to conceal. But so be it. This scenario is true and played to death, but the beaten path is always the most secure. Always? Or maybe it is not?

The following words, and those preceding them, are not the product of an obligation or sense of duty. Nor are they part of any revolutionary obituary. They are far away from and hostile to any attempt to mythologizing, ownership, engaging or disengaging, against the mud slung and the depreciation, which authority is already trying to spread after the disclosure of the identity and photograph of a dead “terrorist” following a gunfight with cops in Daphne. Lambros Fountas, who fell dead in a shootout with the crew of the police squad car in the area of Daphne is known for his anarchist activities.

From his years as a high school student he was socially active and would later join the anarchist group MAVRO AGATHI (Black Thorn), who issued the DROMI TIS ORGIS (Streets of Rage) zine/pamphlet/serial. He was active and participated in marches, rallies, social conflicts, demonstrations, flyposting, discussions and social events.

He was one of the thousands of young people not enrolled at the time with any political youth party involved in the student occupations, demonstrations and clashes prior to and after the murder of Professor N. Temponera in Patras. Those young people were inspired by the insurrectional events of January 1991 as well as anarchist ideas and practices that they appropriated with a vitality which words are incapable of describing. The anarchist group Black Thorn, until its dissolution, participated in the Co-operation of Anarchist Groups and Individuals for Social Solidarity and Diverse Action.

During the occupation of the Polytechnical University of Athens in 1995 for the anniversary of the 1973 Uprising, Lambros Fountas was among the 504 who were arrested by the repressive state forces that invaded the university grounds on the morning of November 18th. He was, therefore, among so many young people of a generation that the politically correct were quick to describe as lost. Among all those who chose their partners’ hand and travelled the 1990s from protest to protest, from roadblock to roadblock, standing in solidarity with passion in every social aspect, who chose to confront power with their rights and their wrongs, their differences amongst themselves and their stubbornness, confounding the authority that wanted them to simply be passers by in the social struggles. Not that there weren’t any such people. Quite the contrary. Since then I have met up with Lambros and been side by side many times in marches, roadblocks and clashes.

We solemnly believe that what the people who fight leave behind them, is what they really contribute and is not superficial to the liberation process from the shackles of oppression and exploitation. This is a legacy that transcends any needs, decisions and choices.

Because the means are not an end in themselves and don’t differentiate those fighting, but rather reveal possibilities, they don’t sanctify those who choose one or another form, nor do they put anyone on a pedestal. There are no unknown comrades who have been unfairly lost. Nor is the point principally, in these situations, the search for operational errors.

Equally, however, we do not agree with the logic that explanations are the privilege of priests, initiates or those well-educated in internal affairs or with those who deal with cases and craft scenarios all the time, that the answer may begin and end with motto: loss is a necessary evil. Our position must be straightforward and outspoken.

We close, saying goodbye to Lambros with an Indian wish (and certainty):”The next time (we meet) will be better!”

ANARCHIST ARCHIVES GROUP FROM ATHENS, 11/3/10.

 

Quelques mots sur Lambros

La lutte de ceux qui se battent contre toutes les formes de pouvoir, qui tiennent tant à ce que chaque instant ne soit pas gaspillé et qui maintiennent obstinément la croyance que nous sommes capables de créer un monde libre et non-autoritaire, est aussi éloignée de n’importe quelle sorte de mythologie ou de fiction que la terre l’est de la lune.


Cette lutte a, avait et aura des pertes innombrables ; les morts, les capturés et ceux qui renoncent parce qu’ils perdent l’espoir ou se compromettent d’eux-mêmes parce que les autorités constituées ont mis le prix suffisant pour les acheter.

Ceux qui cherchent des saints, des martyrs ou des messies, des héros et des bêtes mythiques, ne sont en fin de compte pas différents de ceux qui ne manquent pas d’occasions de pointer leur doigt sur les canailles, les moutons noirs, les suspects et ceux qui ont politiquement déjà perdu. Tant les êtres supérieurs dépeint d’un côté que de l’autre, les créatures extrémistes, sont pareillement superflus. Dans un cas comme dans l’autre, le but est de garder chacun endormi et docile, malgré ce que les partisans de l’un ou de l’autre côté peuvent prétendre.

Certains parlent avec extase de ceux qui ont été « sacrifiés », tandis que d’autres essayent pieusement de mesurer la perte politique. Il y a peu d’importance à savoir si cette convergence est réalisée en raison du fanatisme ou de l’illusion, de l’ignorance ou de l’opportunisme, pour des raisons de visibilité politique, pour la survie ou par dogmatisme. Les fraudes sont difficiles à dissimuler. Mais ainsi soit-il. Ce scénario est réel et joué jusqu’à la mort, mais les chemins déjà parcourus sont toujours les plus sûrs. Toujours ? Ou peut-être que ce n’est pas le cas ?

Les mots suivants, et ceux qui les précédent, ne sont pas le produit d’une obligation ou d’un sens du devoir. Ils n’ont rien à voir non plus avec une quelconque nécrologie révolutionnaire. Ils sont loin et hostiles à toute tentative de mythification, de propriété, d’engagement ou de désengagement, de la boue lancée et de la dépréciation que l’autorité essaye déjà de diffuser après la révélation de l’identité et de la photographie d’un « terroriste » mort après un échange de coups de feu avec des flics à Daphni. Lambros Fountas, qui est tombé lors de cette fusillade avec la police était connu pour ses activités anarchistes.

Durant ses années de lycée il fut socialement actif. Il rejoint plus tard le groupe anarchiste Mavro Agathi (l’Épine Noire), qui publia le journal Dromi Tis Orgis (les Rues de la Colère cf. photo). Il était actif et participait aux manifs, rassemblements, conflits sociaux, marches, collages, discussions et aux événements sociaux.

Il était l’un de ces milliers de jeunes de l’époque à ne pas s’être engagé dans un quelconque parti politique ou mouvement de jeunesse impliqué dans les occupations étudiantes, les manifestations et les heurts avant et après le meurtre du Professeur Nikos Temponeras à Patras [1]. Ces jeunes ont été inspirés par les événements insurrectionnels de janvier 1991 aussi bien que par les idées et les pratiques anarchistes qu’ils se sont appropriés avec une vitalité que les mots sont incapables de décrire. Le groupe anarchiste l’Épine Noire, jusqu’à sa dissolution, a participé à la coopération des groupes Anarchistes et des individus pour la solidarité sociale et l’action diverse.

Pendant l’occupation de l’Université Polytechnique d’Athènes en 1995, pour l’anniversaire du soulèvement de 1973, Lambros Fountas était parmi les 504 qui furent arrêtés par les forces répressives de l’Etat qui envahirent les enceintes universitaires le matin du 18 novembre. Il était, donc, parmi tant de jeunes d’une génération que le politiquement correct fut si rapide à décrire comme perdue. Parmi ceux qui ont choisi les mains de leurs compagnons et voyagé à travers les années 1990 de manifs en manifs, de blocages de routes en blocages de routes, restant debout dans la solidarité avec passion dans chaque aspect de la lutte, qui ont voulus se confronter au pouvoir avec leurs qualités et leurs défauts, leurs différences internes et leur obstination, confondant l’autorité qui voulait voir en eux de simples passagers dans les luttes sociales. Et pourtant il y en eu, de ces passagers. Depuis lors, j’ai rencontré Lambros et nous avons été côte à côte plusieurs fois dans des marches, des barrages routiers et des émeutes.

Nous croyons solennellement que ce que les gens qui se battent laissent derrière eux, sont ce qu’ils contribuent vraiment à accomplir et n’est pas superficiel vis à vis du processus de libération des chaînes de l’oppression et de l’exploitation. C’est un héritage qui dépasse n’importe quels besoins, décisions et choix.

Parce que les moyens ne sont pas des fins en soi et ne différencient pas ceux qui combattent, mais révèlent plutôt des possibilités, ils ne sanctifient pas ceux qui choisissent une forme ou une autre, ils ne mettent non plus personne sur un piédestal. Il n’y a aucun camarade inconnu qui a été injustement perdu. La question, dans ces situations, n’est pas celle de la recherche d’erreurs opérationnelles.

Également, cependant, nous ne sommes pas d’accord avec la logique qui voudrait que ces explications soient le privilège des prêtres, d’initiés ou de quelques connaisseurs des affaires internes, ou avec ceux qui traitent tout le temps avec des dossiers ou les scénaristes de métier. Nous ne sommes pas d’accord non plus avec le proverbe : la perte est un mal nécessaire. Notre position doit être directe et franche.

Nous fermons, en disant au revoir à Lambros avec un proverbe indien (et une certitude) : « la prochaine fois (que nous nous rencontrerons) sera meilleure ! »

Groupe des archives anarchistes d’Athènes, le 11 mars 2010.
Traduit par nos soins.

Notes

[1Le mouvement étudiant de 1991 fut l’un des mouvements sociaux les plus radicaux à avoir existé en Grèce, comportant près de 1500 grèves sauvages ou occupations d’écoles et des manifestations de centaines de millier de personnes. L’assassinat du professeur Nikos Temponeras par des gangs fascistes construits par le parti de droite au pouvoir, amena une quasi-insurrection dans les principales villes de Grèce, avec une manifestation forte de 25 000 personnes à Patras (sur une population de 100 000 habitants), où Temponeras avait été tué, qui fut suivie par l’incendie du commissariat et de l’hôtel de ville. Le même jour à Athènes, 4 personnes périrent dans un incendie qui se déclara au cours d’une manifestation massive. L’agitation civile ne cessa que lorsque le ministre de l’éducation abandonna ses réformes. Le rôle des anarchistes, autant dans l’organisation étudiante que dans la radicalisation du mouvement, fut un catalyseur.

http://www.non-fides.fr/?Quelques-mots-sur-Lambros