Il nostro complotto (it/fr)

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Zo d’Axa (1892)

La Borsa, il Palazzo di Giustizia e la Camera dei deputati sono edifici di cui molto si è dibattuto in questi giorni: queste tre case pubbliche sono state minacciate in particolare da tre giovani che per fortuna sono stati arrestati in tempo.

È impossibile nascondere alcunché ai signori giornalisti, i quali hanno svelato la triplice cospirazione ed i loro confratelli della prefettura hanno immediatamente fermato i cospiratori.

 

Ancora una volta gli uomini della stampa e della polizia hanno meritato il plauso di quella parte di popolazione che non riesce ad apprezzare il pittoresco fascino dei palazzi in rovina e la singolare bellezza dei crolli.
Il pubblico non lesinerà le azioni di grazia a tutte le oche dei suoi campidogli.
I servigi resi verranno riconosciuti anche in moneta sonante. Bisogna incoraggiare le virtù civiche. I fondi segreti balleranno e il dono sarà portato dai salvatori della società.
Tanto meglio! Considerato com’è edificante constatare che, se fra i nostri nemici vi è un esiguo numero di sfruttatori astuti, la maggior parte è composta da imbecilli che spostano i limiti dell’ingenuità indietro fino all’orizzonte.
Come hanno potuto credere, quei disgraziati, che gli anarchici pensassero di far saltare il parlamento proprio in questo momento?
Mentre i deputati sono in vacanza!
Bisogna essere proprio a terra per supporre che i rivoluzionari possano scegliere un momento simile.
Non foss’altro che per cortesia, si aspetterebbe il rientro.

Ciononostante l’altra mattina i bottegai di Parigi, nel sistemare le vetrine, con il loro robusto buon senso si son detti:
— Non c’è il minimo errore, vogliono scalzare le basi dei nostri monumenti secolari, siamo di fronte a un nuovo complotto.
Suvvia, suvvia, prodi bottegai! vagate nei territori dell’assurdo. Pensate un attimo che la cospirazione di cui parlate non è nuova; se si tratta di radere al suolo gli edifici tarlati della società che odiamo, è da tanto che se ne parla.
È il nostro complotto di sempre.
E il tempio della Borsa dove i fedeli cattolici così come i ferventi ebrei si danno appuntamento per i riti e i trucchi del loro piccolo commercio, il tempio della Borsa deve in effetti sparire — e al più presto.
I maneggiatori di denaro saranno a loro volta maneggiati dalla pesante carezza delle pietre che crollano.
Allora non si giocherà più in borsa, non si assesteranno più quegli abili colpi che fruttano milioni a società anonime la cui ragione d’essere consiste nello speculare sul grano e nell’organizzare carestie.
I borsisti e i mediatori, tutti i banchieri — i preti dell’Oro, dormiranno il loro ultimo sonno sotto le macerie del loro tempio.
Solo in un simile atteggiamento di riposo apprezzeremo gli uomini della finanza.

Quanto ai magistrati, è risaputo, non sono mai così belli come quando camminano verso la morte.
È un vero piacere vederli.
La storia brulica di lampi pungenti in onore di procuratori e giudici che il popolo, a tratti, ha fatto precipitare nei tormenti. Quegli uomini, bisogna ammetterlo, hanno l’agonia decorativa.
E che superbo spettacolo sarebbe: un gran trambusto in tribunale! Quesnay intralciato da una colonna che gli ha spezzato le vertebre, mentre si sforza di avere l’aria di un Beauripaire colpito alle Crociate; Cabat, che in un ultimo rantolo cita ancora Balzac; e Anquetil, accanto all’esile Croupi, mentre grida:
— Niente è perduto… ci pieghiamo sotto le nostre posizioni!
La scena avrebbe una tale grandezza che le anime pie quali noi siamo piangerebbero sinceramente i vinti. Non vorremmo più ricordare l’ignominia delle toghe rosse — macchiate dal sangue dei poveri; dimenticheremmo che la magistratura è stata vile e crudele.
Sarebbe l’ineffabile perdono.
E se lo stesso Atthalin, questo specialista dei processi tendenziosi, se Atthalin — col cranio leggermente incrinato, chiedesse di essere portato in una casa di cura, si acconsentirebbe galantemente al desiderio del malato.
Gli si darebbe una rinfrescata senza rancore.

In verità, non è indispensabile sentirsi anarchici per essere sedotti dal complesso delle prossime demolizioni.
Tutti coloro che la società flagella nell’intimità del loro essere desiderano d’istinto penetranti rivincite.
Mille istituzioni del vecchio mondo sono marchiate da un segno fatale.
Gli affiliati del complotto non hanno bisogno di sperare in lontani futuri migliori, conoscono un modo sicuro per cogliere la gioia fin da subito:
Distruggere appassionatamente!

[L’Endehors, n. 65 del 31 luglio 1892]

Un sûr moyen de cueillir la joie tout de suite : détruire passionnément !

Par Zo d’Axa (1892)

La Bourse, le Palais de Justice et la Chambre des députés sont des édifices dont il a été beaucoup question ces jours-ci : ces trois maisons publiques ont été spécialement menacées par trois jeunes hommes qui fort heureusement ont été arrêtés à temps.
II est impossible de rien cacher à messieurs les journalistes, ils ont dévoilé la triple conspiration et leurs confrères de la préfecture ont immédiatement appréhendé les conspirateurs.

 

Une fois de plus les gens de presse et de police ont bien mérité de cette partie de la population qui n’apprécie pas encore le charme pittoresque des palais en ruine et l’étrange beauté des effondrements.

Le public ne marchandera pas les actions de grâces. On reconnaîtra même en espèces sonnantes les services rendus. Il faut encourager les vertus civiques. Les fonds secrets vont danser et le cotillon sera conduit par les sauveurs de la société.
Tant mieux ! car il est édifiant de constater que s’il est parmi nos adversaires un petit nombre d’exploiteurs malins, la grosse masse est composée d’imbéciles qui reculent à l’horizon les bornes de la naïveté.

Comment leur a-t-on fait croire, à ces disgraciés, qu’à l’heure présente les anarchistes pensaient à faire sauter le parlement.
A l’heure où les députés sont en vacances !
II faut être au-dessous de tout pour supposer que les révolutionnaires choisiraient un pareil moment.
Ne serait-ce que par courtoisie, on attendrait la rentrée.

Cependant les boutiquiers de Paris, en faisant leur étalage, l’autre matin, se sont dit avec leur robuste bon sens :
II n’y a pas la moindre erreur, on veut saper les assises de nos monuments séculaires, nous sommes en face d’un nouveau complot.
Allons, allons, braves boutiquiers ! vous errez aux plaines de l’absurde. Songez un peu que la conspiration dont vous parlez n’est pas nouvelle ; s’il s’agit de jeter bas les édifices vermoulus de la société que nous haïssons, il y a longtemps que cela se prépare.
C’est notre complot de toujours.

Et le temple de la Bourse où les catholiques fidèles aussi bien que les juifs fervents se donnent rendez-vous pour les rites et les trucs de leur petit commerce, le temple de la Bourse doit en effet disparaître – et bientôt.
Les manieurs d’argent seront à leur tour maniés par la lourde caresse des pierres qui s’écroulent.
Alors on ne jouera plus ce jeu de bourse, on ne fera plus ces coups habiles qui rapportent des millions à des sociétés anonymes dont la raison d’être consiste â spéculer sur le blé et à organiser des famines.

Les coulissiers et remisiers, tous les banquiers – les prêtres de l’Or -, dormiront leur dernier sommeil sous les décombres de leur temple.
Dans cette attitude de repos, les financiers nous plairont.

Quant aux magistrats, on le sait bien, ils ne sont jamais si beaux que lorsqu’ils marchent à la mort.
C’est un vrai plaisir de les voir.
L’histoire fourmille de trait, piquants en l’honneur des procureurs et de juges que le peuple, par moments, a fait sombrer dans les tourmentes. Ces hommes-là, il faut l’avouer, ont l’agonie décorative.
Et quel superbe spectacle ce serait : un branle-bas au Palais de Justice ! Quesnay gêné par une colonne qui lui aurait cassé les vertèbres, s’efforçant d’avoir la mine d’un Beaurepaire frappé aux Croisades ; Cabot, dans un dernier souffle citant encore du Balzac ; et Anquetil, près du fin Croupi, s’écriant :
– Rien n’est perdu… nous couchons sous nos positions !
La scène aurait une telle grandeur que les bonnes âmes que nous sommes plaindraient sincèrement les vaincus. Nous ne voudrions plus nous souvenir de l’ignominie des robes rouges – teintes du sang des misérables. Nous oublierions que la magistrature fut lâche et cruelle.
Ce serait l’ineffable pardon.

Et si Atthalin lui-même, ce spécialiste pour procès de tendances, si Atthalin, le crâne légèrement fêlé, demandait à être conduit dans une maison de santé, on accéderait galamment au désir de ce malade.
En vérité, il n’est pas indispensable de se sentir anarchiste, pour être séduit par l’ensemble des prochaines démolitions.
Tous ceux que la société flagelle dans l’intimité de leur être veulent d’instinct les revanches aiguës.

Mille institutions du vieux monde sont marquées d’un signe fatal.
Les affiliés du complot n’ont pas besoin d’espérer les lointains avenirs meilleurs, ils savent un sûr moyen de cueillir la joie tout de suite :
Détruire passionnément !

Zo D’Axa dans L’En-dehors, 1892.