La prison de Forest nous montre bien ce qu’est la taule. Détruisons-la !

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La prison, c’est une attaque permanente contre la dignité – A l’intérieur des murs d’une prison, tout vise à briser la dignité des prisonniers. Tous les aspects fondamentaux de la vie sont arrachés de leurs mains et soumis au contrôle de la prison, de ses règles ou de son arbitraire. Mouvement, conflits, contacts humains, dormir, manger, se laver. Toute initiative possible devient une initiative de la prison, et tout développement véritablement individuel est étranglé par la routine quotidienne de l’enfermement et de l’oppression.

Afin que les détenus se mettent, sur la durée, à penser, rêver et agir comme des sujets obéissants, oublient leur liberté et leur dignité, et commencent à vivre selon la morale écœurante de la prison. A Forest, nombreux prisonniers se trouvent à quatre dans des cellules prévues pour deux, avec pour conséquence que nombreux prisonniers dorment en permanence sur le sol. Dans certaines ailes, les toilettes consistent en un seau dans la cellule. Les bâtiments sont en état de putréfaction et grouillent de rats. Les fouilles et autres intimidations de la part des gardiens sont à Forest comme dans toutes les autres prisons, une part fixe de la gestion.

La prison, c’est l’isolement – Enfermer des gens signifie les isoler. Les isoler de leurs proches, amis et bien-aimés. Mais aussi du monde extérieur, d’un milieu qu’ils connaissent, où ils savent s’orienter et dont ils maîtrisent la langue. Le nouveau monde auquel ils sont relégués est celui d’une cellule, où les quatre murs confirment l’isolement, alterné uniquement par les ordres sporadiques d’un abruti en uniforme, par une visite toujours trop courte ou une heure de préau parmi des compagnons d’infortune. La prison crée l’isolement pour mater les prisonniers, pour les faire se sentir seuls, impuissants face au système dominant et à sa Justice. Pour ceux qui se révoltent il y a, à côté de nombreuses sanctions différentes, toujours la cellule d’isolement, où même les alternances les plus minimes sont abolies et qui est pensée pour détruire mentalement et physiquement les prisonniers. A Forest, tout le monde est 23h sur 24 en cellule. Les visites n’ont souvent pas lieu parce que les gardiens trouvent toujours bien une raison pour faire grève, l’utilisation du cachot est tout comme les fouilles et autres intimidations une part fixe de la gestion.

La prison, c’est la torture – Comme tout Etat dans l’histoire, l’Etat belge se sert aussi de la torture comme arme pour faire taire les esprits libres qui remettent en question son pouvoir en s’insurgeant. A côté de tenter d’étrangler toute dignité, de faire triompher le sentiment d’impuissance dans chaque corps isolé, d’autres formes de torture font également partie du fonctionnement quotidien des prisons. Tabasser des prisonniers, allumer et éteindre la lumière toutes les dix minutes pendant la nuit, faire des bruits assourdissants, priver les prisonniers de soins médicaux, de nourriture ou de sanitaire… Pour briser les prisonniers courageux qui n’acceptent pas la loi et l’ordre, les ordures de gardiens déploient toujours une créativité extraordinaire et se voient toujours couverts par la direction et la Justice. A Forest, ces dernières années, quelques histoires ont percé les murs de gardiens (ou de flics, qui remplacent les gardiens quand ils font grève) qui torturaient systématiquement des prisonniers. Depuis d’autres prisons, des histoires identiques sont parvenues au monde extérieur, mais la majorité reste sans doute enfermée à l’intérieur. La torture se révèle une part fixe de la gestion.

Les conditions dans la prison de Forest sont révoltantes. Mais le fait qu’elles sont utilisées comme excuses pour faire avaler la construction d’une nouvelle maxi-prison à Bruxelles est une blague terrible. Tandis qu’ils n’ont apparemment aucun problème à laisser crever pendant des années des centaines de personnes dans de telles conditions, ces mêmes puissants savent très bien que les fondements de la prison de Forest sont les fondements de toute prison, et de toute nouvelle prison. Car la prison est là pour protéger et maintenir cette société oppressive. Maintenir la richesse pour quelques-uns et la pauvreté pour les autres. Maintenir le pouvoir de l’État et du système sur autant d’aspects possibles de la vie. Et l’Etat opèrera toujours la même dualité. La liberté apparante dans leurs rangs d’un côté, et la menace de l’enfermement, de l’isolement et de la torture de l’autre. La couleur des murs de la prison, le nombre de douches ou l’accès à internet en cellule n’y changeront jamais rien.
C’est pour cela que la prison nous touche tous. Qu’on se trouve à l’intérieur ou à l’extérieur, elle nous dit que la liberté n’est que ce que le pouvoir veut qu’elle signifie, et non pas ce que nous voulons nous-mêmes qu’elle signifie.

Le choix de faire quelque chose nous appartient à tous, à l’intérieur comme à l’extérieur. A l’intérieur, la situation spécifique dans laquelle la prison se trouve pourrait offrir des possibilités intéressantes. Une révolte, ouverte ou pas, dans laquelle les bâtiments seraient inondés ou le circuit électrique saboté pourrait être suffisant pour rendre ingérable la prison. A l’extérieur, la solidarité peut devenir très concrète en mettant des bâtons dans les roues des entreprises qui font tourner cette prison, les politicien(ne)s et le personnel qui rendent possible son fonctionnement, et tout ceux qui créent quotidiennement la prison dehors. On peut saboter cette atrocité pour qu’elle cesse enfin d’exister.
Et soufflons ce feu aussi en direction de la maxi-prison en prévision et de tous les autres camps d’enfermement de l’État.

Car à l’ombre d’une prison, personne ne peut être libre…

FEU A TOUTES LES PRISONS !

[Texte d’un tract diffusé dans les rues de Bruxelles, septembre 2015]

http://www.lacavale.be/spip.php?article267