Solidarité révolutionnaire (fr/en)

arton658-58da7

Il y a de nombreuses manières de manifester de la solidarité envers des compagnons criminalisés par l’État, chacune d’entre elles est une expression directe de la manière dont on intervient dans le conflit social en général.

 

Il y a ceux qui voient la solidarité comme un service social prêté à tel ou tel compagnon arrêté, et ils font des choses telles que : chercher des avocats, envoyer de l’argent et des vêtements, rendre visite, etc. Cette solidarité purement humanitaire se traduit aussi par la constitution de comités de défense et leurs campagnes dont le but est d’influencer l’opinion publique.

Et puis il y a ceux qui voient la solidarité dans un sens strictement politique et qui jouent à faire un tas de « distinctions » dont le but est de ne pas compromettre l’image de leur propre activité. Donc pour des raisons opportunistes, ils défendent et font preuve de solidarité envers ceux qui se déclarent innocents, pas envers ceux qui revendiquent leurs actions.

D’autres encore, s’ils voient qu’il y a quelque chose à gagner en termes de propagande politique, sortent immédiatement des tracts et des brochures en solidarité formelle avec le ou les compagnons arrêtés, c’est-à-dire, ils se déclarent solidaires en mots, tandis qu’en pratique il n’y en a pas la moindre trace.

Et puis il y a la solidarité dans un contexte idéologique. C’est le cas des marxistes-léninistes dans leur version du parti révolutionnaire combattant. Ils expriment leur solidarité avec ceux qui ont des positions semblables aux leurs, et sont en opposition avec ceux qui ne partagent pas ou ne reconnaissent pas leur ligne politique ou leur stratégie, utilisant souvent la censure et l’ostracisme contre ceux qu’ils considèrent gênants.

Qu’est-ce que nous pensons que solidarité révolutionnaire veut dire alors ?

Le premier aspect est celui de voir la solidarité comme le prolongement de la pratique sociale insurrectionnelle que l’on mène déjà au sein du conflit de classe, c’est-à-dire, comme une démonstration directe d’actions d’attaque contre toutes les structures du pouvoir, grandes et petites, qui sont présentes sur son propre territoire. Et ceci parce que celles-ci devraient toujours être tenues pour responsables de tout ce qui arrive dans la réalité sociale, y compris, par conséquent, la criminalisation et l’arrestation de compagnons où qu’ils soient. Réduire la question de la répression contre des compagnons à quelque chose de strictement lié à l’appareil policier et judiciaire serait un manque de vue à long terme. La criminalisation et l’arrestation de compagnons doivent être vu dans le contexte de la lutte sociale dans son ensemble, précisément parce que celles-ci sont toujours les moyens matériels hâtifs utilisés par l’État pour décourager partout la radicalisation. Peut importe sa grandeur ou son insignifiance, tout acte de répression fait partie des rapports de la lutte sociale en cours contre les structures de la domination.

Le deuxième aspect est que tout les compagnons révolutionnaires devraient être défendus par principe, peu importent les accusations portées contre eux par l’appareil légal et policier de l’État, tout d’abord parce qu’il est question de les arracher à leurs griffes, c’est-à-dire, aux conditions d’« otage » auxquelles ils ont été réduits. En outre, il est aussi question de ne pas perdre l’occasion d’intensifier l’attaque contre la « loi » qui se veut l’expression régulatrice de touts les rapports de pouvoir présents dans la société constituée.

Le troisième aspect concerne le refus d’accepter la logique de défense qui est inhérente à la loi constitutionnelle, comme par exemple le problème de l’« innocence » ou de la « culpabilité » des compagnons impliqués, et cela parce que nous avons beaucoup de bonnes raisons de les défendre et personne ne peut justifier l’opportunisme politique de ne pas le faire. Nous ne pouvons pas et nous ne devons pas nous considérer comme des avocats, mais comme des anarchistes révolutionnaires en guerre sur tous les fronts contre l’ordre social constitué. Nous cherchons à détruire radicalement ce dernier de haut en bas, le juger, comme il le fait avec nous, ne nous intéresse pas. Pour cette raison, nous considérons toute sentence dictée par les vautours de l’État contre des prolétaires révoltés, et d’autant plus s’il s’agit de compagnons, comme une sentence dictée contre nous et qui doit, comme telle, être vengée par tous les moyens que nous considérons opportuns, en accord avec notre tempérament et nos goûts personnels.

Le quatrième et dernier aspect concerne notre attitude à l’égard des compagnons arrêtés, envers qui nous continuons à nous comporter comme à l’égard de ceux qui ne sont pas en prison. Ce qui veut dire que nous unissons toujours, dans chacun des cas, une critique radicale à la solidarité révolutionnaire. Nous pouvons montrer notre solidarité envers des compagnons, et nous le faisons, sans pour autant épouser leurs idées. Ceux qui montrent leur solidarité envers des compagnons ne sont pas nécessairement mêlés à leurs opinions et points de vue, et la même chose vaut pour nous en ce qui les concerne. Nous soutenons activement tous les compagnons emprisonnés en tout, mais seulement dans la mesure où ce que nous faisons pour eux n’entre pas en opposition avec ou ne contredit pas notre manière d’être révolutionnaire insurrectionnaliste. Notre relation est exclusivement celle entre révolutionnaires sociaux en révolte, pas celle d’un marchandage de positions. Nous ne sacrifions aucune part de nous-mêmes, tout comme nous n’en attendons pas moins des autres.

Nous considérons la solidarité comme une façon d’être complices, comme une manière de prendre un plaisir réciproque et nullement comme un devoir, un sacrifice pour la « bonne et sacrée cause », parce que c’est notre propre cause, c’est-à-dire, nous-mêmes.

En partant de ces principes, de première importance dans le développement de notre action anarchiste insurrectionnaliste, la solidarité révolutionnaire prend du sens en tant que telle, parce que nous montrerions un simple soutien matériel à n’importe quel ami qui se retrouve en prison.

La solidarité révolutionnaire est partie intégrante de notre être en tant qu’anarchistes insurrectionnels. C’est dans cette dimension qu’elle devrait être manifestée sans cesse, précisément parce que cela contribue à élargir ce que nous faisons déjà.

Pierleone Porcu.
Dans la La Cavale N°11, janvier 2008.

 

Revolutionary Solidarity

There are many ways to demonstrate solidarity to comrades who are being criminalised by the State, each one of which is a direct expression of the way one intervenes in the social clash in general.


There are those who see solidarity as lending a social service to this or that arrested comrade, and that is the way they carry out their activity: looking for lawyers, sending money and clothes to prison, visiting and so on. This purely humanitarian solidarity also translates itself into the constitution of defence committees and relative campaigns aimed at influencing public opinion.

Then there are those who see solidarity in a strictly political key and play at making a heap of “distinctions” aimed at not compromising the image of their own activity. So for reasons of opportunity they defend and show solidarity to those who declare themselves innocent, not to those who Claim responsibility for their actions.

Others still, if they see there is something to be gained in terms of political propaganda, immediately bring out flyers and leaflets in formal solidarity with the comrade or comrades arrested, i.e. they declare solidarity in words, while in practice there is no trace of it.

Then there is solidarity in an ideological context. This is the case of the marxist-leninists in the revolutionary combatant party version. They show solidarity with those with positions similar to their own, and are in contrast with those who do not share or recognise their political line or strategy, often using censorship and ostracism against those they consider inconvenient.

What do we think we should mean by revolutionary solidarity then? The first aspect is that of seeing solidarity as the extension of the insurrectional social practice one is already carrying out within the class clash, i.e. as a direct demonstration of actions of attack against all the structures of power, large and small that are present in one’s own territory. And that is because these should to all effects be considered responsible for everything that happens in social reality, including therefore the criminalisation and arrest of comrades wherever they are. It would be short-sighted to reduce the question of repression against comrades to something strictly linked to the legal and police apparatus. The criminalisation and arrest of comrades should be seen in the context of the social struggle as a whole, precisely because these are always the hasty material means used by the State to discourage radicalisation everywhere. No matter how great or insignificant it might be, every act of repression belongs to the relations of the social struggle in course against the structures of dominion.

The second aspect is that each revolutionary comrade should be defended on principle, irrespective of the accusations made against them by the State’s legal and police apparatus, in the first place because it is a question of snatching them from its clutches i.e. from the conditions of “hostage” they have been reduced to. Moreover, it is also a question of not losing the occasion to intensify the attack against the “law” intended as the regulating expression of all the relationships of power present in constituted society.

The third aspect concerns the refusal to accept the logic of defence that is inherent in constitutional law, such as for example the problem of the “innocence” or “guilt” of the comrades involved, and that is because we have many good reasons for defending them and no one can justify the political opportunism of not doing so. We cannot and must not consider ourselves lawyers, but revolutionary anarchists at war against constituted social order an all fronts. We aim at radically destroying the latter from top to bottom, we are not interested in judging it as it does us. For this reason we consider any sentence made by the State vultures against proletarians in revolt, and all the more so if they are comrades, to be a sentence against ourselves and as such to be avenged with all the means we consider opportune, according to our disposition and personal inclinations.

The fourth and final aspect concerns our attitude towards the arrested comrades, whom we continue to behave towards in the same way as those not in prison. That means that to revolutionary solidarity we always and in any case unite a radical critique. We can and do show solidarity with imprisoned comrades without for this espousing their ideas. Those who show solidarity to imprisoned comrades are not necessarily involved in their opinions and points of view, and the same thing goes for us as far as they are concerned. We actively support all imprisoned comrades in all and for all, but only up to the point where what we do for them does not come into contrast with or contradict our revolutionary insurrectionalist way of being. Ours is exclusively a relationship between social revolutionaries in revolt, not that of bartering positions. We do not sacrifice any part of ourselves, just as we do not expect others to do the same.

We think of solidarity as a way of being accomplices, of taking reciprocal pleasure and in no way consider it a duty, a sacrifice for the “good and sacred cause”, because it is our own cause, i.e. ourselves.

Starting from these premises, of primary importance in the development of one’s anarchist insurrectionalist action, revolutionary solidarity takes on meaning as such, because we would show simple material support to any friend who ends up in prison.

Revolutionary solidarity is an integral part of our very being as insurrectional anarchists. It is in this dimension that it should be demonstrated incessantly, precisely because it contributes to widening what we are already doing.

Pierleone Porcu.